chapitre premier
broken heart can't be fixed

- Je sors.
Il le dit simplement, aussi naturellement qu’il lui donnerait l’heure. Kisuk ne lui demande pas son autorisation, il n’attend même pas de réponse pas de sa part, pas même de réaction, il s’impose, et puis c’est tout. Peu importe qu’elle ait prévu quelque chose de spécial pour eux, peu importe qu’elle minaude ou boude, Kisuk sortira quand même. Mais Kisuk est un homme bien, alors il s’approche d’elle, pose une main sur sa hanche, et il a ce sourire sur les lèvres, qui rassure, apaise et console les cœurs. Il a ce regard qui lui dit que ça ira, et que même s’il sera là-bas, pour elle, il sera quand même toujours un peu là. Et ça passe. Ca passe toujours, et même quand elle flanche parfois, même quand elle comprend qu’il lui ment aussi facilement qu’il respire, elle continue de lui sourire doucement, légèrement, sans essayer de l’arrêter. Elle voudrait lutter, mais elle a fini par abandonner cette idée, de peur qu’il s’en aille vraiment.
Et Kisuk en profite. Il s’en amuse, quand il l’embrasse sur le front en lui disant parfois qu’il est désolé, qu’il l’aime mais qu’il n’y peut rien. C’est la vie qui est comme ça. C’est pas de sa faute, c’est toujours celle des autres. Son patron, ses collègues ou ses potes, c’est la même rengaine toutes les semaines. Alors elle acquiesce, et puis elle le laisse partir. Elle sait que y’en a d’autres, des femmes plus belles, plus intéressantes, plus enivrantes, tellement différentes mais tellement séduisantes qui tournent autour de lui, qui finissent souvent dans son lit, mais après tout, c’est la vie.
Il s’en va sans un regard. La tête haute, la démarche droite et fière. Le lion qui quitte sa cage dorée pour aller chasser. Et elle attend. Elle attend qu’il revienne. Elle attend que ça passe, mais ça passe jamais. Kisuk est comme ça. Blasé, fatigué, la monotonie le ronge de l’intérieur et y’a plus rien qui lui fait envie.
Dans son cœur, c’était déjà le néant depuis longtemps.



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chapitre second
look what you made me do

Silence. Assis sur sa chaise, les bras croisés, Kisuk l’observe d’un regard indifférent. Sa femme cherche de quoi alimenter la conversation, et elle raconte des moments passés, ces histoires qu’il a fini par jeter et oublier dans un coin de la tête. Nostalgique, elle se souvient des baisers qu’ils s’échangeaient et des mots doux qu’il lui glissait dans l’oreille mais dans son sourire, Kisuk n’y décèle qu’une profonde mélancolie. Mélancolie qui ravive les blessures mais qui soulage la douleur. Il entend son ton se peindre d’une tristesse infinie et il ne peut s’empêcher d’en être étrangement rassuré. C’est drôle, de voir comme elle souffre en silence. C’est drôle de voir comme une simple remarque peut faire des ravages. C’est drôle de voir comme il se sent revivre en la voyant sombrer. Kisuk a besoin de sa peine pour survivre. Il se nourrit du malheur des autres pour rester en vie.
Et quand elle tente une approche, pose une main sur son bras, il se détache froidement d’elle, imperceptible, impassible face à son chagrin et aux larmes qui coulent délicatement sur ses joues. Ca le ferait presque marrer s’il n’était pas aussi fatigué. Fatigué de cette comédie, fatigué de voir comme il est si facile de se détacher du monde.
- Reprends-toi.
Il assène, et ça ressemblerait presque à une menace. Reprends-toi, ou sombre avec moi.